Le Rideau

Sanguine

85 x 72 cm

Clef de lecture

     Contrairement à Masque Visagé, même si la tête de face du personnage remplit toujours la fonction de contact, le corps lui, de trois quart (position idéale lorsque l’on souhaite mener à bien une interaction), adoucit l’interpellation pour inviter à porter le regard sur le paysage marin à l’arrière et ainsi, en souligner les éléments signifiants, volontairement simples par soucis d’intemporalité. Ces éléments apparaissent comme des clefs de lecture du domaine caché par le rideau qui s’interpose entre les deux plans. Ce rideau, dans sa fonction ici de révélation < ré-velum, convie l’imagination du destinataire à le traverser ; et la trouée par laquelle apparaît le masque divin ne laisse aucune place au doute quant à la nature de la découverte. Le rideau permet également d’intégrer le spectateur au tableau, lui offre de progresser dans la lecture du dessin en l’insérant dans un plan privilégié entre le lieu où il se tient et le premier plan.

    La légèreté de l’effacement des deuxième et troisième plans que l’on s’attendrait à voir plus accentué pour transcrire la profondeur, évite à la pensée de s’enfuir vers l’horizon et renforce l’appel à la vacuité du regard derrière lequel le spectateur est invité à se glisser avec, en main, tous les indices dispersés en orbite autour de lui pour perméabiliser les zones subconscientes. Seul l’espace abyssal du regard aspire au vide, à cet autre côté imperceptible mais dont l’utilisation des sens autorise juste à en éveiller l’intuition, l’évidence de cette présence invisible.

    La rose présentée par le personnage symbolise le féminin sacré et l’initiation aux mystères. Fleur des alchimistes, elle évoque le secret, comme l’atteste son emploie dans la locution latine  » sub rosa « . Quant au diadème, il porte la marque du croissant de lune, symbole riche de la féminité, le personnage figurant ainsi l’astre matérialisé en femme, astre que l’on retrouve dans les autres tableaux guidant barques et bateaux.

    La récurrence des signes du troisième plan est donc consubstantielle à l’unité thématique puisque le principe lunaire, en engendrant les marées, s’avère étroitement lié à la mer et, comme elle, évoque le passage. Exerçant plus largement son influence sur l’ensemble du biotope, elle n’attend qu’une mise en lumière solaire pour nous éclairer dans la nuit de notre ignorance. De nombreux dieu apparaissent sous ses traits dont Thot (Hermès Trismégiste des Grecs), neter de la transmission de la connaissance et inventeur de l’écriture qui utilise les symboles pour en dissimuler les secrets.